Société – Réparer le sommeil des Français

Une récente enquête* dirigée par l’institut de sondage IFOP auprès d’un millier de Français de 18 ans et plus montre que femmes et hommes dorment de plus en plus mal. En cause, l’actualité anxiogène, les écrans et la charge psychique.

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En 1995, 4 Français sur 10 disaient souffrir de problèmes de sommeil. Plutôt stable pendant deux décennies, ce chiffre bondit avec le covid en 2021 pour atteindre aujourd’hui 7 adultes sur 10 ! L’actualité pourrait être en cause : entre pandémie et guerre en Ukraine, le climat anxiogène nuit à la qualité du sommeil, la grande majorité des personnes interrogées se tenant informée au moins une fois par semaine.

Trop d’écrans

Pourtant, mieux vaut éviter les écrans depuis le couchage. Un Français sur deux regarde la télé ou des vidéos tous les jours: 64% des 25-34 ans contre 38% des 65 ans et plus. Mais 7 sur 10 consultent aussi leur téléphone au moins une fois par semaine dans leur lit… Le spécialiste du sommeil Marc Pfindel (voir encadré) explique :

« Les écrans d’ordinateur, de smartphone sont à abolir avant de se coucher à cause de la fameuse lumière bleue qui retarde l’endormissement. Elle va avoir une action sur notre horloge biologique : tant qu’on a de la lumière bleue, il y a un signal d’éveil. Quand il disparaît, la mélatonine c’est-à-dire l’hormone du sommeil est sécrétée ».

La charge psychique explique aussi les 87% de femmes qui peinent à s’endormir parce qu’elles pensent à autre chose, 1 sur 3 au quotidien contre 1 homme sur 5. De même, les réveils nocturnes et les difficultés à se rendormir affectent plus les femmes. Seuls 13% des Français ne se réveillent jamais la nuit… Parmi les autres activités pratiquées au lit, 28% des personnes y mangent tous les jours, 40% ont des rapports sexuels au moins une fois par semaine, et 41% y étudient ou travaillent de temps en temps.

Trop de stimulations

Globalement, « nos sociétés allant à 200% sont responsables du raccourcissement du temps de sommeil, estime le Dr Pfindel. On a perdu plus d’une heure ces quinze dernières années, parce qu’on a de plus en plus de stimulations électriques, photographiques, d’écrans, de sons, de lumières… Le seul moyen dans une journée de gratter un peu de temps pour être avec sa famille, ses amis ou plus actif, c’est de prendre sur le sommeil. Et en plus, il est empêché par ces stimulations ».   

(*) A retrouver sur www.ifop.com/publication/etude-pour-la-journee-mondiale-du-sommeil/


Le docteur Marc Pfindel, spécialiste du sommeil, au centre du sommeil Respire à Haguenau. / ©DR

5 questions à Dr Marc Pfindel

Spécialiste en pathologie du sommeil au centre du sommeil Respire à Haguenau et Saverne

Pour quelles raisons les gens vous consultent-ils ?

Souvent ils viennent pour une cause après en avoir parlé à leur médecin, qui les oriente vers le seul centre agréé SFRMS pour le nord de l’Alsace (la Société française de recherche et médecine du sommeil a agréé 50 centres en France, NDLR). Trois causes principales sont avancées : la fatigue dans la journée, les insomnies et les apnées du sommeil. Ensuite moins fréquentes, les gens qui bougent la nuit, les cauchemars, un partenaire qui réveille l’autre.

Des catégories se dégagent-elles ?

L’insomnie est une pathologie plus féminine, l’apnée plus masculine, mais pas de manière exclusive. Les jeunes sont souvent des gens très décalés, couche-tard et lève-tard, surtout les ados. Pour le reste, c’est assez uniforme.

Y a-t-il une tendance particulière en Alsace ?

L’Alsace et tout le croissant nord-est sont touchés par l’apnée du sommeil en lien avec l’obésité, ce sont les mêmes zones. Par ailleurs, notre manque de luminosité, surtout en hiver, avec les journées grises et peu de soleil, favorise les troubles du sommeil. Pour avoir un bon sommeil, il faut avoir une véritable alternance jour/nuit. Et en Alsace, en octobre-novembre, on ne sait pas trop s’il a fait jour ou pas ! Notre rôle est alors de recycler le rythme circadien.

Quels sont les remèdes ?

Le somnifère est une mauvaise réponse à un vrai problème. Dans notre centre du sommeil, on ne prescrit jamais de somnifère ! Toutes nos solutions sont non médicamenteuses. Et les mauvaises habitudes prises dans l’enfance se répercutent beaucoup à l’adolescence, par exemple les écrans ou les couchers tardifs ou irréguliers.

Le mal de dos touche 7 Français sur 10, qu’en est-il ?

Comme on ne dort pas suffisamment, on a mal partout. Les troubles de la mémoire et de la concentration, les douleurs musculaires, la pénibilité du travail : tout devient pénible quand on manque de sommeil !


7 conseils pour bien dormir

  • Pas d’écrans 2h avant de se coucher,
  • Pas de thé ni de café le soir,
  • Un repas léger,
  • Pas de sport violent le soir,
  • Une chambre entre 17 et 19°C ,
  • Un lit d’au moins 1m60 pour un couple,
  • Un sas entre sa journée de travail et son sommeil.