Les vieux ne parlent plus

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L’autre jour ma voisine est sortie de chez elle en sanglots. Elle venait de voir le témoignage bouleversant du réalisateur et écrivain Daniel Schick sur France 5. Il racontait le quotidien de son père de 97 ans. Il ne s’agit pas de maltraitance, mais de négligence qui le hante. Il parle pour libérer la parole et faire bouger les lignes. Schick raconte qu’on hurle aux oreilles de son père alors qu’il n’est pas sourd, qu’il est sanglé alors qu’il marche, que le soir on lui dépose son plateau-repas et qu’il bouffe le cellophane qui recouvre les plats, qu’il ne peut pas écouter la radio parce qu’elle est simplement débranchée. Il se sent tellement impuissant. D’autres témoignages racontent l’enfer des EHPAD.

Alors que faire ? Rien tout seul évidement. Il faut que ce problème devienne enfin un enjeu politique, que lors de cette campagne présidentielle où rien ne se dit, des promesses soient faites et tenues, que des engagements soient pris. On fait comme si les vieux ne ressentaient rien, comme si leur bien-être n’était pas une priorité. Il faut que dès maintenant notre façon de considérer nos anciens devienne une grande cause nationale, que les familles de plus en plus désespérées et en souffrance retrouvent un peu de dignité, comme ceux qui, comme le chantait Brel, n’ont plus d’illusions, ceux qui ne parlent plus.

Alors qui est leur voix ? Qui les défend devant l’injustice et les dysfonctionnements de certains EHPAD ? Quel candidat aura, au-delà des promesses, la capacité et l’envie de régler cela ? Qui ? C’est essentiel, car dans le regard des anciens, il y a l’humanité tout entière. Et, une civilisation qui ne prend pas soin de ses vieux est une civilisation qui ne se regarde pas dans les yeux. Dans ceux de ma voisine comme dans ceux des aidants, il y a beaucoup trop de larmes.