Le monde de la nuit à l’agonie

Alors que dans certaines régions, bars et restaurants ferment à nouveau leurs portes, les boîtes de nuit, elles, n’ont pas rouvert depuis maintenant sept mois. Pour beaucoup, les aides proposées ne suffisent pas. En Alsace les patrons manifestent leur désarroi.

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1500 euros. C’est la seule et unique aide (destinée aux entreprises) que perçoit Christophe Schaendel pour l’Acropole, son établissement de 1 500 m2 situé à Surbourg. Tandis que ses frais fixes, eux, s’élèvent tous les mois entre 10 000 et 12 000 euros… « C’est un véritable cauchemar. Cela fait 20 ans que je suis chef d’entreprise. J’ai toujours évolué dans le monde de la nuit, mon métier c’est ma passion. J’ai travaillé dur pour devenir propriétaire et voilà que tout s’écroule. C’est très angoissant, d’autant plus qu’aujourd’hui, je suis père de famille », confie-t-il, désemparé. Sa vidéo « coup de gueule », postée le 12 juillet sur son compte Facebook, est devenue virale avec 87 000 vues et 1 700 partages.

Si son établissement a longtemps été une discothèque, l’Acropole est, depuis 5 ans, une salle d’organisation d’événements. Mais contrairement aux salles polyvalentes environnantes, il ne peut toujours pas louer sa salle ni organiser d’événements.
« Alors que les clubs échangistes, eux, sont ouverts ! », rappelle-t-il.

25 chefs d’entreprise locaux unis pour défendre leur profession

En plus d’être propriétaire de l’Acropole, Christophe Schaendel est également dj, auteur-compositeur et artiste et possède son propre label « Lochness Industry Records ». La musique, c’est véritablement toute sa vie. Il a composé un nouveau morceau intitulé
« Résistance » téléchargeable sur toutes les plateformes. Un titre sans équivoque. «Le monde de la nuit a toujours eu mauvaise presse. Beaucoup pensent qu’on ne fait que s’amuser, qu’on se couche à 6h et se lève à 16h. Mais c’est faux. Gérer une boîte de nuit c’est énormément de travail», ajoute-t-il en rappelant que « sans les discothèques, il n’y a pas de fête. Et que sans la musique, il n’y a pas de vie ».

Peu après le confinement, le « collectif des patrons de discothèques du Bas-Rhin et du Haut-Rhin », a été créé à l’initiative de Flipper Barina, gérant de la boîte «Le Next», à Strasbourg. 25 chefs d’entreprise locaux unis pour défendre leur profession. « Nous avons rencontré la Préfète de la Région Grand Est, nous nous sommes rendus à Paris, mais pour l’instant, rien ne bouge », constate Flipper. « Les charges, les loyers, les crédits continuent de tomber ».

Vers une fermeture jusqu’en avril 2021 ?

Comme pour toutes les entreprises, les patrons ont pu demander un prêt garanti par l’État (PGE). « Mais tous n’ont pas pu l’obtenir et pour ceux qui ont pu en bénéficier, ils leur restent six mois avant de devoir commencer à rembourser », précise Flipper. Un fonds de soutien visant à couvrir dans la durée les charges fixes des professionnels à hauteur de 15 000 euros par mois maximum a également été annoncé par le Gouvernement. « Pour l’instant, quelques-uns en ont bénéficié, mais la majorité attend la modification du décret pour effectuer la demande. En espérant que les conditions d’obtention soient
assouplies »,
ajoute Flipper. Quant au chômage partiel, il continue d’être versé pour les employés à hauteur de 85%.

Reste à savoir maintenant si le régime d’exception transitoire qui a remplacé l’état d’urgence sanitaire le 11 juillet, et qui doit prendre fin le 30 octobre prochain, sera prolongé. Le Premier ministre Jean Castex a, en tout cas, annoncé qu’il envisageait de le prolonger jusqu’à fin avril 2021. « Ce qui reviendrait à 13 mois de fermeture. Une situation absolument inenvisageable si l’État ne prend pas en charge nos frais fixes et nous permet d’avoir, au moins, un revenu décent », conclut Flipper.