Jérôme Forgiarini, Beau oui, comme Forgiarini

Dirigeant et directeur commercial, Jérôme représente la 3e génération de l’entreprise familiale qui a développé depuis les années 50 un savoir-faire dans le domaine du bois, élargi au fil des générations à toute une gamme de produits pour la maison, des matériaux de décoration et de finition. Meubles de salle de bains, sanitaires, parements pour les murs, parquets. Forgiarini c’est 65 personnes, un chiffre d’affaires annuel de 15 millions et trois sites, dont celui de la zone commerciale de Vendenheim. Rencontre avec un homme qui n’arrête pas ; il est aussi Président de l’Association des commerçants de Strasbourg Nord et élu à la CCI, délégation commerce.

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L’histoire de la société Forgiarini commence avec l’arrivée de votre grand-père en Alsace. Racontez-nous.  

Oui, il faisait partie des maquisards, des montagnards de l’Italie du Nord, plutôt spécialisés dans le sabotage de l’avancée des Allemands. Il n’avait pas 20 ans en quittant son pays pour l’Alsace où le travail ne manquait pas. Il est venu avec rien, juste un paquet de cigarettes et un sac à dos. Il était charpentier et ça tombait bien parce qu’il y avait beaucoup de maisons à réparer et à construire. Il a rencontré ma grand-mère à Benfeld, ils sont tombés amoureux et en 1958, ils ont fondé la société. Ils ont exploité le bois, travaillé dur, et petit à petit, d’abord à Kogenheim la ville d’origine de ma grand-mère, la société a grandi.

La deuxième génération est celle de vos parents et de vos oncles et en 2004, votre génération a intégré l’entreprise. Comment définir la société Forgiarini ?

Nous avons la rigueur alsacienne et l’abnégation au travail des Italiens du Nord, et nous sommes des passionnés de décoration. On part du principe que ce n’est pas parce que l’on a un budget serré que l’on doit absolument faire des choses pas terribles. Ce n’est pas parce que le prix est raisonnable que ce n’est pas beau. 

Je vous ai souvent entendu parler du consommer local, ce n’est pas une nouveauté pour vous ?

Il y a 12 ans avec Gilles Peter, un webdesigner alsacien, nous avons créé ce qui s’appelle le Made in Elsass, nous étions parmi les premiers à revendiquer le fabriquer local. Mon grand-père nous disait toujours qu’il fallait aller chez nos clients, cela signifiait que si quelqu’un t’achète quelque chose il faut savoir lui rendre la pareille. C’est une forme d’économie circulaire. Nous allons vers des restaurateurs, des boulangers, toute sorte de métiers, pour les faire travailler car ils nous ont fait travailler. Nous n’avons pas attendu d’être obligés d’acheter local pour y penser, ce n’est pas vraiment une obligation, c’est un style de vie, comment recréer intelligemment du pouvoir d’achat sur sa zone de chalandise, donner une partie de ce que tu gagnes à un restaurateur parce qu’il t’a acheté du carrelage pour son établissement permet de le voir revenir un jour quand il refait des travaux. Et puis, quand tu fais travailler des entreprises locales, quand tu génères du volume, les prix baissent. Pour moi, dans le commerce, c’est un mode de vie essentiel. 

Dans votre emploi du temps chargé, vous trouvez le moyen d’être Président des commerçants de Strasbourg Nord et élu de la CCI, Pourquoi ? 

C’est l’envie de rester altruiste. Alors il y a sans doute une forme de naïveté là-dedans, c’est un peu dans nos gènes, on aime rendre service, on a été élevé comme ça, le fait de vouloir que ça se passe bien pour tout le monde. Pour la zone commerciale de Strasbourg Nord, on est venu vers moi. Je m’y retrouve bien sûr, je rencontre des gens, je m’enrichis intellectuellement, être élu de la CCI m’a permis de rencontrer de très belles personnes parmi les grands entrepreneurs de la région, mais j’espère remplir mes missions au mieux. Je le fais vraiment pour l’intérêt collectif. 

Construire des zones commerciales comme celle de Strasbourg Nord, cela n’a plus de sens aujourd’hui, si ? 

Ce qui est important c’est de comprendre le fond, parce que la forme est toujours critiquable. Cette zone était en train de péricliter tout doucement, les routes n’étaient pas en bon état, il n’y avait pas de trottoir pour sécuriser la marche des passants, pas d’espace vert, etc. L’Eurométropole a été intelligente, soit elle laissait mourir cette espace et ses 3000 emplois, et bien entendu les taxes qui entrent dans les caisses pouvaient se perdre, soit elle entrait dans une démarche de réhabilitation et elle utilisait ce qui existait pour le valoriser. Pour financer et rentabiliser le projet, on a alloué des terrains à Frey, un financeur, un aménageur, ce qui a permis de construire des routes. Certains diront que 9 millions ont été versés par l’Eurométropole, mais bon, on rénove bien le stade de la Meinau pour 120 millions… Et pour répondre à votre question, je ne suis pas favorable au développement de ces zones partout, pas du tout, on a besoin de commerces en centre-ville pour créer de la proximité, pour éviter de prendre sa voiture, je suis quelqu’un de plutôt pragmatique, mais cette zone commerciale de Vendenheim n’est pas comme les autres, elle existait déjà. 

À part votre société et votre famille, qu’aimez-vous faire dans la vie ? 

C’est sans prétention, mais si je pouvais rendre les gens un peu plus heureux, je le ferais.