Georges Barget, la rue et vers l’or

Lors du 1er confinement en mars 2020, Georges Barget a donné de son temps pour réaliser les premiers masques en tissu pour les citoyens haguenoviens. Puis, il a été missionné pour les livrer. C’est là qu’il s’est rendu compte que de nombreuses plaques manquaient aux extrémités des rues de sa ville d’adoption. Autour d’un café, il nous a raconté sa vie, sa naissance en 1944 du côté de Limoges, son arrivée en Alsace vingt ans plus tard, sa carrière dans la raffinerie de Reichstett. Il est le septième d’une famille de neuf enfants, père lui-même de trois enfants et retraité depuis 21 ans. Le café était bon, mais la rencontre délicieuse.

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"Je me sens bien ici, car l'Alsace est la pépinière du bénévolat" Georges Barget

Racontez-nous pourquoi vous êtes à l’origine de la pose de nouvelles plaques aux extrémités des rues de Haguenau.

Dans le bénévolat quand vous commencez à dire «bonjour», il n’y a pas de « au revoir » qui existe. Nous devions faire 5 000 masques, on en a fait 20 000 et j’ai fait la livraison également. J’allais livrer, à vélo, tous les jours. À un moment, je suis arrivé dans une rue, j’étais certain que c’était la rue des Aviateurs, mais il n’y avait pas de plaque. Je suis allé à l’autre bout et effectivement il y avait là une plaque qui confirmait que j’étais bien dans la rue des Aviateurs. C’est vrai que je suis un peu narcissique, mais j’aime surtout les choses bien faites.

C’est comme ça que ça a commencé ?

Oui. Je me suis aperçu que sur certaines maisons il n’y avait pas de numéro, mais surtout que dans certaines rues il n’y avait pas de plaque. Personne ne m’a rien demandé, mais je me suis dit que j’allais faire une liste des plaques manquantes. J’ai vu le maire de Haguenau et je lui ai dit que j’avais fait cette liste. Il pensait qu’il en manquait quelques-unes, mais pas la cinquantaine de ma liste. Il était très étonné. Il m’a indiqué le service qui s’en occupe et toutes les plaques ont été fabriquées en quelques mois. Je suis même revenu avec une liste complémentaire, au total, 68 plaques ont été posées. 

Pourquoi faites-vous cela, alors que personne ne vous a rien demandé comme vous l’avez dit ? 

J’ai travaillé dans la raffinerie. La raffinerie c’est une bombe. On sait ce qu’il ne faut pas faire, il n’y a aucune tolérance. Dans une rue, il doit y avoir le nom aux deux extrémités, il n’y a pas à discuter. 

Vous êtes perfectionniste ?

On peut dire ça. C’est un petit peu gonflé de le dire, mais on peut. C’est vrai que je suis exigeant. Quand je commence un boulot, je le termine. Je ne lâche pas. C’est pour cette raison que j’étais heureux de travailler à la raffinerie, dans de très bonnes conditions, avec des gens instruits, intelligents, c’était le top. Quand tout marchait bien, on avait du temps pour se retrouver, pour parler. C’était très enrichissant. J’ai la chance d’avoir pris ma retraite à 55 ans. Comme j’ai travaillé en 3×8 pendant 20 ans, la société Shell m’a permis de prendre ma retraite cinq ans avant l’âge légal qui était 60 ans à l’époque. Pour répondre à votre question précédente, comme j’ai la chance d’être en bonne santé et disponible, je m’intéresse beaucoup à la vie de ma cité. Quand on a eu besoin de volontaires pour faire des masques j’y suis allé, je suis aussi bénévole pour la Fête du houblon où depuis 15 ans j’accompagne des groupes folkloriques qui viennent du monde entier. Je donne un coup de main au Club vosgien pour faire du marquage et baliser les chemins.

Et l’on peut vous retrouver également du côté du Musée du bagage de Haguenau ?

Oui, étant très curieux, un jour j’ai visité le musée et j’ai rencontré Monsieur et Madame Rolland, les responsables. Je leur ai proposé de faire des visites guidées et commentées. Je raconte le vécu, le nom du fabricant et différentes choses autour des bagages. J’y suis souvent les dimanches après-midis, les visites sont guidées gratuitement. J’ai la chance d’avoir beaucoup de frères et sœurs qui ont souvent servi dans des associations eux aussi, comme nos parents ; même s’ils ont eu neuf enfants, ils donnaient de leur temps. Et puis, je me sens bien ici, car l’Alsace est la pépinière du bénévolat. Je ne connais pas la raison, mais on trouve ici le plus grand pourcentage de bénévoles de France. Ici, tout est particulier, les églises, l’école, les cotisations à la sécu, les notaires, la chasse, les jours fériés, les trains… Sur n’importe quel sujet, c’est différent. Je suis curieux et pugnace depuis toujours. C’est cette curiosité qui m’a permis de me cultiver et d’aimer rencontrer des gens.