Comment fonctionne le nouveau pôle national de lutte contre la haine en ligne ?

Treize prévenus étaient jugés à Paris pour avoir participé au cyberharcèlement de l’adolescente Mila, après sa vidéo polémique sur l’islam publiée en novembre 2020. Un nouveau cas d’école en matière de justice sur les réseaux sociaux.

0
682
Mila à sa sortie du tribunal en juin 2021 / ©AFP

« C’était une nécessité impérieuse de regrouper ces affaires au sein d’un pôle spécialisé », estime Richard Malka, l’avocat de Mila, jeune femme de 18 ans menacée de mort suite à ses propos islamo-phobes tenus sur Instagram et Facebook en 2020. « Ses insultes n’ont pas été retenues pour incitation à la haine en raison de la pression psychologique exercée sur la plaignante, à une contre 100 000. On fait face à un phénomène de société, il fallait une réponse adaptée. Les interlocuteurs, ce sont les GAFA, Twitter, TikTok, etc. Si vous laissez ça à 90 procureurs non spécialisés partout en France, ils n’ont pas le temps et se font balader. Avec un seul interlocuteur spécialisé, ça change tout, ça donne plus de poids, on obtient plus facilement les infos. »

Le premier tribunal qui juge les internautes

Quelles sont les garanties que la violence ne sortira pas de l’écran ? Comment les insultes, le harcèlement et les menaces en ligne sont jugées par la justice ? Avant le procès Mila
– l’affaire la plus emblématique dont il ait eu la charge –, ce pôle avait été saisi de 140 dossiers. En collaboration avec la plateforme Pharos, qui recueille les signalements de contenus illicites, il mène discrètement la lutte contre la haine en ligne. Constitué de six magistrats, de juristes spécialisés en droit de la presse et dans les in-fractions en ligne, ce nouveau département se saisit depuis sept mois des cas les plus complexes et les plus médiatiques. Selon le parquet de Paris, la collaboration entre ce nouveau département et les réseaux sociaux se passerait pour l’instant convenablement.
« Les opérateurs [les réseaux sociaux] sont obligés de retirer les contenus manifestement haineux. Ils ont aussi l’obligation de supprimer rapidement les contenus pédopornographiques et apologétiques du terrorisme. Cela fonctionne bien et peut éviter une diffusion rapide »
, avait assuré le procureur de la République de Paris lors d’un entretien avec l’AFP.

L’affaire Mila : le cas d’école

Le tribunal de Paris a condamné 11 prévenus dans l’affaire Mila à des peines allant de 4 à
6 mois de prison avec sursis. Plusieurs d’entre eux sont en outre condamnés à verser à la jeune femme 1500 euros chacun en raison des souffrances endurées. Un soulagement pour beaucoup, mais il faut le rappeler : il ne s’agit que d’une seule affaire sur des miliers d’autres adolescents harcelés, parfois des âmes plus innocentes encore.