Audi E-tron : la prise de risque

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Audi met les doigts dans la prise et présente l’E-tron, son premier SUV 100 % électrique. À l’image de ce que peut représenter l’EQC pour Mercedes, ce modèle, qui ouvre une nouvelle ère pour le constructeur allemand, est sans doute, pour les Anneaux, la plus importante sortie de ces dernières décennies.

Le « dieselgate » qui a malmené les constructeurs allemands a eu pour principale conséquence de les voir accélérer le déploiement de solutions alternatives. Mercedes a déjà présenté l’EQC, son premier SUV 100 % électrique, basé sur une technologie plutôt conservatrice puisque reprenant la base technique des autres crossovers de l’Étoile. BMW se déplace de salon en salon avec un prototype survolté, l’iX3, qui sera mis en production dans les trois ans à venir. Audi s’avance aujourd’hui avec sa solution maison, l’E-tron Quattro. Les trois grands noms du premium Allemand s’attaquent ainsi frontalement à Tesla, empêtré dans ses problèmes de production à grande échelle. L’ambitieux Américain a ainsi du souci à se faire : Audi, BMW ou Mercedes savent, eux, faire tourner des usines à plein régime.

Patience et longueur de temps

L’Audi E-tron Quattro a été présenté pour la première fois en 2015 au Salon de Francfort. Insensible à la précipitation que semblait imposer la tendance de fond qui traverse l’industrie automobile, la firme d’Ingolstadt a pris son temps pour peaufiner son véhicule futuriste. Tellement de temps que la livraison du SUV électrique, prévue pour cette fin d’année, a encore été repoussée de quelques semaines afin de déployer une mise à jour logicielle alors que les commandes étaient déjà ouvertes. Il faut dire que ce nouveau venu est un concentré de technologies inédites aussi fragiles que prometteuses. En option, par exemple, l’E-tron remplace les rétroviseurs à miroir classiques par des caméras. La rétrovision est déportée dans des écrans haute définition Oled de 7 pouces placés dans l’angle des portières. Comme sur un smartphone, il est possible de zoomer et de dézoomer, ainsi que de changer l’angle de vue en déplaçant l’image avec les doigts. L’ordinateur de bord intègre même trois modes d’affichage différents : conduite sur autoroute, virage et stationnement. Bluffant !

Ces caméras futuristes permettent à l’E-tron de grappiller quelques points sur son coefficient de pénétration dans l’air (Cx). C’est sur ce terrain que le travail des ingénieurs allemands est le plus impressionnant. Positionné entre le Q5 et le Q8, l’E-tron Quattro s’avance avec de généreuses mensurations – 4,90 m de long, 1,94 m de large, 1,62 m de haut et 2,93 m d’empattement – mais atteint un Cx de 0,28 seulement. Dès 80 km/h, des volets situés sur la calandre, les flancs et l’arrière se mettent en action automatiquement et redirigent les flux d’air afin d’améliorer encore davantage l’aérodynamisme. La silhouette générale trahit cette quête d’optimisation mais ne fait pas dans la caricature du véhicule futuriste. Comme d’habitude chez Audi, les lignes sont simples et épurées, offrant un parfait équilibre entre modernité, discrétion et élégance, à l’image du bandeau lumineux qui relie transversalement les deux feux arrière.

Maîtrise technique

Si l’Audi E-tron repose sur la même plateforme que ses frères thermiques, l’architecture technique a été retravaillée en profondeur. Le SUV embarque deux moteurs électriques asynchrones, dont la puissance cumulée flirte avec les 360 ch et dont le couple atteint 560 Nm. Chacun des deux blocs se positionne sur un essieu, offrant ainsi une transmission intégrale. Audi affirme que le 0 à 100 km/h est bouclé en un peu plus de 4,6 sec., confirmant les bonnes dispositions sportives du crossover. La bride électronique n’est d’ailleurs pas activée avant 210 km/h. Un « boost » temporaire pousse même la puissance à 408 ch et le couple à 660 Nm durant 8 secondes. Ces performances doivent beaucoup au choix de la batterie : pesant 700 kg à elle seule, longue de 2,28 m, large de 1,63 m et épaisse de 34 cm, elle fournit 95 kWh. Ses proportions démesurées assurent une très bonne répartition des masses et un excellent maintien au sol avec un centre de gravité très bas. L’autonomie est annoncée à 400 km en homologation WLTP, la plus réaliste des normes à ce jour. L’E-tron intègre un inédit système de recharge de 150 kW à même de remplir 80 % de la batterie en moins de 30 minutes. Il faudra pour cela se brancher à une borne Ionity dont le déploiement s’accélère en Europe. Pour une tranquillité totale, le planificateur GPS affiche l’itinéraire approprié avec les points de charge requis pour ne pas tomber en panne, la facturation automatisée à la station de recharge et la commande à distance via un smartphone. Avec le Visual Cockpit, la navigation ajoute sa pointe moderne à un intérieur classieux. Si l’on note la présence de palettes au volant, celles-ci ne servent pas à changer les vitesses, puisqu’il n’y en a pas, mais à régler le niveau de récupération d’énergie au freinage. Ce dernier est d’ailleurs électro-hydraulique, une première sur un véhicule de ce type.

L’E-tron est ainsi une merveilleuse vitrine technologique pour Audi. Tout ceci a cependant un prix : l’E-tron s’affiche à 82 000 € en entrée de gamme et le bonus écologique de 6 000 € ne viendra pas compenser la hausse rapide des tarifs lorsque l’on pioche dans la longue liste d’options. Il y a forcément un prix à payer quand on s’achète un billet pour le futur…