Antoine Westermann. Une belle vie après les étoiles.

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Antoine Westermann

Antoine Westermann est né et a grandi à Wissembourg. À l’âge de 23 ans, il devient chef du Buerehiesel à Strasbourg. Il obtiendra la consécration, trois étoiles au Guide Michelin. Il est aujourd’hui propriétaire de Drouant, Mon Vieil Ami, Le Coq Rico et La Dégustation à Paris. Rencontre avec un homme d’exception, à quelques heures de l’ouverture de son nouveau restaurant, à New York.

Éric Genetet : Wissembourg, c’est votre enfance…

Antoine Westermann : Les images qui me reviennent immédiatement, ce sont les grandes bouffes familiales, les dimanches. On passait à table à midi dix, pas à midi un quart. On finissait le soir vers dix-neuf heures. Le plaisir de bien manger, c’était quelque chose de capital. Je ne me suis pas dirigé vers un métier de plaisir pour les autres, un métier de bouche, par hasard.

EG : Pourquoi était-ce si important dans votre famille ?

AW : Mon père a connu la guerre, les temps difficiles, les manques. Il a créé son entreprise qui employait une vingtaine de personnes. Il est devenu quelqu’un d’apprécié et de respecté à Wissembourg. Ses grands plaisirs étaient ceux de la table. Il aimait inviter des amis.

EG : Le rôle de votre mère fut également très important pour le choix de votre carrière.

AW : Ma mère faisait la cuisine tous les jours, et elle la faisait drôlement bien. Mais le dimanche, c’était mon père. Sa cuisine était beaucoup plus riche, des plats en sauces, alors que ma maman, c’était la sagesse, une sagesse trempée dans des produits de qualité. Elle avait beaucoup de talent.

EG : Vous avez grandi dans une maison incroyable à Wissembourg. Pouvez-vous nous dire quelques mots ?

AW : La maison du sel. Elle trône au milieu de la ville, en face de l’église et à côté de la mairie. C’est la maison de mon enfance, elle est superbe, gigantesque. Quand je rentre à Wissembourg, le premier endroit où j’ai envie d’aller c’est la maison du sel, j’aime tourner autour et renifler le passé.

EG : Professionnellement, de quoi êtes-vous le plus fier ?

AW : Quand tu es cuisinier, que tu commences comme apprenti au Buffet de la Gare de Strasbourg et que tu finis par obtenir trois étoiles au Guide Michelin, c’est sur que ta grande fierté, c’est ça. C’est le sacre de toute une vie professionnelle. Ça m’a donné la possibilité d’assouvir ma passion, et de faire la cuisine que j’aime.

EG : Aujourd’hui, vous n’êtes plus dans la course aux étoiles ?

AW : Je me suis demandé si j’avais envie de continuer à jouer avec ce très beau jouet. Dans ce cas, il n’y a pas de surprise, il faut rester au top ; je me disais que j’allais ronronner. Il y a une vie après les étoiles. J’ai osé dire à Michelin : « Prenez tout, je ne veux plus rien ». J’ai commencé une nouvelle vie. Avant, c’était de la haute couture, maintenait c’est du prêt-à-porter, avec les meilleurs produits possibles, avec beaucoup de simplicité. J’aime faire une cuisine accessible pour tous.

EG : Et maintenant, c’est New York. Vous ouvrez votre restaurant sur Park avenue dans quelques heures, pourquoi NYC ?

AW : Le Coq Rico, rue Lepic à Paris, remporte un succès dingue. Les Américains me demandaient souvent pourquoi je n’ouvrais pas un restaurant comme celui-là à New York. Je me suis laissé entrainé sur ce chemin. Pendant deux ans, j’ai visité des fermes, j’ai cherché les meilleures volailles américaines. J’ai hâte de leur faire découvrir autre chose que le fine chicken.