1914-1918, de l’art du camouflage militaire

Lundi 18 novembre, à Griesbach, Lise Pommois, membre du bureau de la SHARE (Société d’Histoire et d’Archéologie de Reichshoffen et Environs), animera une conférence sur « l’art du camouflage ou la grande illusion ». Premières utilisations de gaz toxiques, de chars d’assaut, la Grande Guerre a aussi marqué les débuts du camouflage militaire : « tromper l’œil de son ennemi en se fondant dans son environnement, en devenant quasi invisible sinon méconnaissable ».

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Maxi Flash : Vous effectuez de nombreuses recherches à Washington, et restituez les informations sous forme d’expositions ou conférences chaque année dans le Nord Alsace, c’est cela ? 

Lise Pommois : Je me rends régulièrement aux archives militaires de College Park (Grand Washington) mais aussi à Saint-Louis (Missouri), à Carlisle (Pennsylvanie). Je consulte les rapports quotidiens des divisions ou autres unités qui ont combattu dans l’Est de la France, des photos et films d’époque, des cartes d’état-major… Mes dernières recherches portent sur les débuts de l’aviation avec l’escadrille Lafayette en 1916 qui donneront lieu à une nouvelle exposition qui débutera à la fin du mois.

MF : Parlons du camouflage militaire lors de la Première Guerre mondiale.

LP : Le camouflage militaire date des années 1914-1918, il est le fait d’artistes renommés. La section de camouflage, créée en 1915, a employé 3 000 artistes en 1917 comme André Mare, André Dunoyer de Segonzac, Eugène Corbin… ou l’art dans la guerre. Le terme est récent, le mot « camouflage » est apparu vers 1916 ou 1917 en même temps que «camoufleur», celui qui sert dans une unité de camouflage. Il viendrait du mot italien « camuffare », cacher ou déguiser, à moins qu’il ne descende du vieux français « camouflet » qui désigne un nuage de poussière ou de fumée qu’on envoie en pleine figure de son adversaire.   

MF : L’idée même du camouflage pour l’homme prend ses racines dans la nature.

LP : Comme la plupart des animaux, en temps de guerre, l’homme doit sa survie au camouflage. Il lui faut tromper l’œil de son ennemi en se fondant dans son environnement, en devenant quasi invisible sinon méconnaissable, comme la pieuvre, entre autres, grand maître du camouflage.

MF : Le camouflage fait alors appel à tous les sens ?

LP : De visuel à l’origine, le camouflage aujourd’hui fait également appel aux autres sens. Il peut ainsi être auditif en utilisant un silencieux, ou encore olfactif, en dissimulant par exemple l’odeur du chasseur ou celle d’aliments. Il est devenu extrêmement sophistiqué, comme le montre la tenue Ghillie, portée par les chasseurs dans la jungle.

MF : Qu’en est-il du camouflage visuel pendant la Première Guerre mondiale ?

LP : En août 1914, les Français abordèrent la guerre revêtus de leurs pantalons et de leurs képis rouges. Personne n’en avait contesté la couleur. Les Anglais, forts de leur expérience de la guerre en Afrique du Sud, avaient adopté le kaki en 1900, et les USA les avaient suivis en 1902. Les Allemands avaient mis au point la tenue « feldgrau » en 1907, les Autrichiens avaient choisi le gris brochet et les Italiens le gris vert en 1909.
Les Français étaient en retard dans ce domaine.

MF : Pendant votre conférence vous évoquerez la mémoire du caporal Jules-André Peugeot, qui était-il ?

LP : Né en 1893, à Etupes (Doubs), instituteur et incorporé dans l’armée en 1914, le caporal Jules-André Peugeot est la première victime française. Futur élève officier, il surveillait la frontière à Joncherey (Territoire de Belfort), lorsqu’il vit arriver un détachement ennemi en reconnaissance conduit par le lieutenant Albert Otto Mayer, allemand originaire de Mulhouse, alors ville occupée.

Conférence L’art du camouflage ou la grande illusion : lundi 18 novembre à 20h à la salle polyvalente de Griesbach

Exposition L’escadrille Lafayette les week-ends du 30 novembre au 22 décembre au musée du Fer à Reichshoffen